Quelques-uns des textes écrits par les participants de l’atelier d’écriture de la MJC du Vieux Lyon en 2006/2007




Une première saison d'atelier permanent, accueilli par la MJC du Vieux Lyon. La création d'un vrai groupe, bien des émotions d'écriture, l'aventure continue. Le projet de cet atelier est consultable sur cette page.

Vous pouvez retrouver dès maintenant des textes écrits en 2006/2007 de Françoise Auray, Nicole Durand, Moïse Garcia, Christiane Giroud, Thomas Groux et Catherine Plantier en cliquant sur le nom choisi.


 

 

 

 

Textes de Françoise Auray

 

 

 

Lorsque tu seras prêt

Ce sera jour d’orage

Nuages et soleil noirs

envahiront  mon ciel

 

lorsque tu seras prêt

ce sera jour de jeûne

de ton rire, de ta voix

à jamais j’aurai faim

 

lorsque tu seras prêt

ce sera jour d’ennui

s’égrèneront les heures

sablier de tristesse

 

lorsque tu seras prêt

ce sera jour de froid

au jardin endormi

plus rien ne poussera

 

lorsque tu seras prêt

ce sera jour de doute

ton regard silencieux

me verra-t-il encore ?

 

lorsque tu seras prêt

ce sera jour d’oubli

colères et blessures

se seront évanouies

 

lorsque tu seras prêt

ce sera jour d’envol

papillons éphémères

de souffles partagés

 

lorsque tu seras prêt

pour ton voyage immobile

 

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Tu m’appelles et je viens…laideur du décor…ta main sur ma main…

Tremblement de ta voix…Tu racontes….

Jeune homme au saxo… Beauté du Soleil Levant sur les Alpes…

Main décharnée…Reste encore…

Main qui implore…Caresse infinie…Taches brunes sur tes mains…

Tu dis le ruisseau, le chemin…Temps suspendu…

Je te rejoins…

Impossible…

Larmes qui coulent sur tes mains…

Ne me laisse pas…

Merci….

 

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Mortes saisons

 

Deux cigognes en voyage

Avec une fulgurante lenteur

Se trompent de printemps.

 

Bourgeons d’hiver

Comme petits seins qui pointent

 Dure sera la chute

 

Tes cheveux blancs

Là sous mes yeux

Mon souvenir de neige

 

Douceur assassine

De l’hiver

Une abeille pleure ses fleurs

 

Beauté glacée

Le pâle soleil d’hiver

Sur le cadavre de l’ours blanc

 

Neiges éternelles

Accrochées aux nuages

Se sont envolées

 

Respirer l’odeur du printemps

Sous des pommiers en fleurs

Quel rêve étrange

 

Transpercée de soleil

Elle agonise

La couche d’ozone

 

Goutte de rosée

Du matin

Tu n’étais qu’une larme

 

La folie des hommes

Un jour finira

noyée 

.

Glacier bleuté

enlacé à l’eau claire du torrent

l’amour te perdra

 

 

se souvenir

éperdument

une pilule bleue pour le printemps

printemps et autres saisons

avant de mourir

regardez-moi encore un peu

 

 

 

Impressions Arctiques

 

 

Infiniment glacial

Infiniment gris

Infiniment doux

 

Hiver du Grand-Nord

Ta mer en furie

Fait balancer mon lit

 

Au matin sans jour

De l’hiver Arctique

Ta bouche invente le soleil

 

Sur le fjord gelé

Le brise-glace avance

Craquent mes certitudes

 

Du monde en gris et blanc

Jaillit le feu d’artifice

De mes couleurs intérieures

 

Cristal armé de béton

Aux portes de l’Arctique

La cathédrale veille

 

A la tombée du jour

Dans l’océan de gris

Flotte une maison rouge

 

Sur la plaine enneigée

Les hurlements des chiens

Ont réveillé la lune

 

Émigrée à jamais

Au-delà des frontières

De ton cercle invisible

 

Manteau d’hiver silencieux

Sur la ville endormie

Les corbeaux crient

 

 

Abandonné

Sous les piliers de la maison verte

Un bateau s’est noyé

 

Musique céleste

Le pont suspendu

Fait l’amour au vent

 

Dressé dans l’océan

Un phallus rouge et blanc

Cligne de l’œil

 

Nuit bénie

Le blizzard et la lune

Ont enfanté une Aurore Boréale

 

Nuit glacée

Pour punir le vent déchaîné

Le matin ne viendra pas

 

Nuit polaire

Combien d’âmes veux-tu

Avant de ressusciter le soleil

 

Dans cet enfer glacial

Rôde l’ombre inquiétante

De tes cargos-fantômes

 

Au soir qui tombe

Le ciel rejoint la mer

Tout est en ordre

 

Nuit de tempête

Je pleure

Des larmes de mer

 

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textes de Nicole Durand

 

Feuille blanche

Peur tissée et déchirée

Pénélope s’est suicidée

 

Des filets de poissons

L’eau tourbe

Déborde furieuse mise en scène

 

Fêtarde dites-vous

Quand j’empoigne la misère

Feu d’artifice annulé

 

L’affiche des mendiants

Défilé angoissant de vies sans lendemain

Ni dictionnaire

 

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« Le présent, c’est un squelette qui frappe à la porte » pense-t-elle.

Le soignant l’entend.

Elle ne parle plus depuis longtemps.

Le soignant l’écoute … les mots crissent

Elle n’a plus mal depuis longtemps d’avoir trop mal.

Le soignant la regarde.

Suis-je encore vivante, pense-telle ?

Que de douleurs accumulées depuis longtemps.

Ils sont morts tous mais ils rôdent encore.

Fantômes et revenants

Elle n’espère plus, plus rien, du tout.

Il écoute ce corps mort depuis longtemps.

C’est trop lourd, pense-t-elle.

Depuis si longtemps devine-t-il.

 

 

______

 

 

Le voyage immobile

 

La femme au sommeil lointain

En habits de fantôme

Traverse les jours et les nuits

Dans l’indifférence générale

Maison berceau

Maison tombeau

 

Faux air calme et front lisse

Transparente et diaphane

Elle console, apaise les cris

Calme les gémissements les plus exigeants

Sans sorties, sans soirées, sans repos

Maison berceau

Maison tombeau

 

Tout le monde l’oublia

Et elle s’oublia

La Télé pour seul univers de ses nuits blanches

l’enferma peu à peu

l’isola du monde des vivants

Maison berceau

Maison tombeau

 

La nuit l’habite et l’engloutit

Depuis hier

Depuis toujours

Quand la peur rôde et veille

Frêle esquif sur l’océan

Elle s’abandonne enfin au chancre sourd

Qui ronge et prolifère

Sans cri, sans plainte, sans gémissements

Maison berceau

Maison tombeau

 

M’en songe

La femme qu dort d’un sommeil lointain

Se dira-t-elle un jour qu’elle n’est plus seule ?

La maison tombeau qui l’abrita

Et qu’elle entretint

Sans qu’elle soit jamais devenue la sienne

Cette maison-là

Berceau ou tombeau

qui l’agrippa

ne fut jamais la sienne

Maison berceau

Maison tombeau

 

 

Front lisse

Faux air calme

Tout la rendait diaphane, transparente

Elle s’oublia

Tout le monde l’oublia

Elle disparut peu à peu

Dans l’indifférence générale

D’une famille, d’un voisinage, d’un quartier, d’une petite ville

Maison berceau

Maison tombeau

 

 

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Texte de Moïse Garcia

 

 

«  On peut supporter seul le chagrin, mais il faut être deux pour être heureux »  a dit E. HUBBARD.

 

« Il faut, quelle obligation ! »

Par pitié, le jour où nous en serons là, sauvez-vous !!

 

Ce jour là, notre amour sera comme le cancer, il nous rongera lentement.

Ce jour là, je ne serai plus moi, le moi qui vous parle aujourd’hui, le moi que je suis quand vous êtes avec moi, qui me remplit d’énergie et d’émotion à la foix. Ce moi qui vous regarde avec l’œil qui brille.

Ce jour là, sauvez-vous. Sauvez vous car, j’aurai décidé que vous m’appartenez.

 

M’attendiez vous, pour vous épanouir, pour vous réaliser ?

M’attendiez vous, pour vivre, pour connaître l’exaltation de vos cinq sens ?

Comment un tel fatalisme, une telle obligation de résultat, peut-il nous pousser à l’épanouissement ?

Comment cela peut-il nous pousser hors de la routine ?

Tout ceci vous manque beaucoup trop de respect, tout ceci nous manque beaucoup trop de respect.

 

Le respect est la clé de voûte, d’une relation durable, et ces deux piliers sont le choix et la liberté.

Le choix nous donne l’envie, l’épanouissement, le goût du renouvellement, du dépassement de soi.

La liberté, renforce l’amour, les liens fait prendre conscience de ces vrais sentiments …

 

 

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textes de Christiane Giroud

 

 

Je suis faite de larmes

Je ne suis pas de bois

Je suis pleine de charmes

Je ne suis pas ses pas

 

La pluie illumine

Le soleil se répand

Je monte sur des cimes

Ou tombe dans l’étang

 

Je suis tout émue

Je ne suis pas si loin

Je me rue n’importe où

Me trompe de chemin

 

Je suis une tourmente

Qui s’endort sans broncher

Je ne suis pas le calme

Qui malmène le destin

 

Je suis la pluie d’automne

L’eau vive des chemins

Je suis la feuille morte

Le réveil des chagrins

 

Je ne suis pas neige

Qui endort la nature

Je ne suis pas froidure

Qui grignote la terre

 

Je suis une minute

Qui s’agite pour rien

Je ne suis pas rythmée

Pour vivre la durée

 

Je suis une heure peut-être

Mais je la trouve longue

 

 

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un pas résonne

un pas s'approche

léger

gai

décidé

                        elle en frémit

une voix chantonne

douce

mélodieuse

insaisissable

                        mais … il chancelle

                                    soleil couchant

                                    forêt ombreuse

le pas se feutre

hésite un peu

s’éteint

se voile

devient distrait

s’embourbe dans la lassitude

ténébreux

imparfait

                        lune blafarde

                        lac suspect

un cri

inquiet

bafouillé

acide

la voix grince

elle questionne

ce pas ?

 

la peur s’insinue

tenace

les échecs passés …

l’espoir en veille …

                        voix qui s’estompe

 

ciel assombri

                                    nuages glauques

                                    lumière enfouie

                                    froid tourmenté

                        pas incertain

 

(comme ils hésitent)

 

l’homme s’illumine du regard

il entend une mélodie … ?

qui se faufile

se réinvente

                                    ciel laiteux

                                    lumière frivole

                        murmures offerts

la voix s’enhardit

elle chante

folâtre

caracole

elle ose, s’essaie

oublie des notes

                        soleil farceur

                        forêt vibrante

les pas piétinent

s’émerveillent

dansent

sautillent un peu

eux

là, tous deux

n’y croient guère

rires graves

tourbillons

bonheur si proche

                        la lune frémit

                        délicate.

 

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textes de Thomas Groux

 

 

Il est confortable de se complaire dans un chagrin solitaire. Si le goût de l’aventure devient intenable, il faut se résigner à faire route à deux pour rechercher le bonheur.

Quel inéluctable ennui, quel sombre désespoir faut-il pour se lancer ainsi en cette tortueuse route ?… Car on devra y braver tant d’insurmontables crises, de redoutables (et redoutés) instants de doute, d’inéluctables renoncements. Qui sait combien l’on devra user, au hasard des péripéties, de vérités et de mensonges, de difficiles compromis, ou de concessions inconcevables ; et pour quels résultats imprévisibles et aléatoires ?

Le cuisant échec guette sans relâche et attaque sans merci.

Voici une aventure qui attend ses héros.

Outre les habituelles qualités requises dans ce genre d’affaire : courage, témérité, aveuglement, intelligence, bêtise, passion, etc… o, demandera encore ici aux protagonistes de savoir s’accorder.

Quels fous voudraient donc s’y embarquer ?

 

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Le rêveur voyage…

Il admire le paysage inédit, contemple les fleurs inconnues, puis le mouvement des branches dans le vent et ceux du vent dans les arbres…

 

Le rêveur voyage…

Il voit d’étranges animaux, de douces fourrures, de magnifiques plumes, des cuirs souples.

Il entend des chants mélodieux et de drôles de cris.

 

Le rêveur voyage …

Il rencontre des gens. Des sages prêts à lui révéler les secrets de l’univers. Des Apollons et des nymphes prêts à lui dévoiler leurs charmes.

Le rêveur sursaute.

Le réveil a sonné.

 

 

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Cher Monsieur,

 

Comme vous le savez, les nouvelles mesures gouvernementales contre la surpopulation prévoient l’euthanasie de tous les citoyens âgés de plus de 75 ans. Malheureusement, nous sommes au regret de vous annoncer que, du haut de vos 118 ans, vous serez l’un des premiers bénéficiaires de ces nouvelles mesures. Nous vous prions de considérer l’importance de votre sacrifice pour le bien commun de note société.

Un groupe de médecins se présentera à votre domicile d’ici une semaine. Veuillez prendre toutes les dispositions qui s’imposent d’ici là.

En vous souhaitant une agréable fin de vie, veuillez accepter nos salutations distinguées.

 

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Je suis le rocher de la sagesse

Je ne suis pas n’importe quoi !

Je suis le bon conseil de tout un village

Je ne suis pas une pauvre pierre en plein désert

Je suis le protecteur de leurs troupeaux

Je ne suis pas du genre à les laisser se perdre

Je suis garant de leur météo

Hier, le chaman est venu se plaindre

Il trouve que la pluie ne tombe pas assez

Il m’a sacrifié son meilleur veau

Il m’a longtemps scruté

Peut-être a-t-il fini par comprendre

En repartant l’air dépité

Je ne suis qu’un vieux rocher.

 

 

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textes de Catherine Plantier

 

 

J’ai longtemps cru que la vie était un long fleuve tranquille ; rien ne pouvait briser ce bonheur pastel : mari, enfants, amis…l’existence sans pincement, sans tiraillement, sans douleur.

Et puis ce matin, comme un tremblement de terre, comme un éboulement, comme un fantôme dans un placard…je venais de me faire griffer par mon chat.

Juste un coup de griffe, punition pour l’avoir dérangé, pédant et presque obséquieux.

J’étais donc cela ? Vide de moi, plein des autres, serviteur utile et pressé, par qui ? Par quoi ?

Je m’étais assujettie consciemment par peur…des autres, du monde. Il avait fallut l’entaille d’une griffe sur ma main pour comprendre que j’étais endeuillée de moi.

 

 

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La caravane du silence, dans le jour et la nuit parcourt la terre, dans un sens, dans l’autre. Inlassable, elle s’use, fracassée par les bruits. Quand elle s’arrête, elle dérange, on la rejette, on n’a pas de place pour elle.

Elle doit poursuivre sa route, parfois chassée par les cris et le chaos, elle doute du chemin à suivre. Chargée des trésors de la paix, pleine des germes de la raison, brûlante de l’intériorité…  elle tient bon. Et parfois au milieu des violences, des turpitudes, des difficultés humaines, un chien aboie et la caravane passe.

 

 

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Ma main remonte, elle est comme un éventail

Elle cherche

Rien.., douceur d’une peau d’enfant

J’essaie de comprendre

Désir, défi, amour…

Tu es, tu ne bouges plus

Je suis ton étrangère au plus intime

Tu es là, regard de chien perdu.

J’entreprends, l’éventail évente

Laiteuse et zébrée

Accord rythmé sous mes mains

Elle appelle

Nez, bouche, cheveux

A goûter…

Étendue déserte,

J’y dessine, virgules et points d’interrogations

Mes yeux boivent

Blanc comme le lait d’une chèvre

Ce torse imberbe que je raconte

 

 

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Les participants ont proposé une lecture publique de leurs textes le 12 juin 2007 à la MJC.

 

À suivre en 2007/2008…