Ateliers "le temps des mots" - extraits de travaux - saison 2008/2009
Haïkus
Lumière obscure
Terre
boueuse
Le
caméléon si serein
Un
ciel d’arc-en-ciel
Je
vole
Langueur
candide
Lumière obscure et scintillante
Parfum d’encens hindous
Murmure discret et secret
Terre boueuse,
Sables fins humides
Velours de mousse et de lichens,
Êtres diaphanes
Voiles blancs, je vole !
Un ciel d’arc-en-ciel !
Une maison en bois,
Une douce fourrure
Formes incongrues,
On se rassemble pour se réchauffer
Pie, pauvre pie, la mal aimée,
Caméléon, si serein
Et qui aime mes caresses
Non, non, l’horreur !
Ce n’est pas moi !
Langueur candide
Un nouveau monde
Une truffe sur mon mollet
Salma la bossue !
Où donc est le chien jaune ?
Marie-Claire Carré
La nuit américaine
Caméra Action 1
La nuit américaine perd
son sens, un trop de lumière l'oblige
La nuit est là dans la
conscience de son existence
La Nuit, elle, au bout
du chemin
Le souffle du vent
révèle l'inutile
Des civilisations
s'effondrent, des hommes, non pas elles, non pas eux
Celles et ceux que l'on
a construit illusion
Que l'on a pris pour
l'Essence
Nomme-toi
La nuit est dans la
paume de la main
Te vois-tu
Seul
L'Homme luit dans le
Noir
Caméra action 3
Des centaines de chiens
accourent les antennes relevées
Il est l'heure de partir
et tout le monde est fou fou
Du calme !
On prend tous le car
jusqu'à Lans en Vercors
Où le ciel est si dégagé
Le trajet, les valises,
les brosses à dents sorties de leurs étuis
Les colliers, les
cravates, le nécessaire de lavage
C'est une véritable
caravane moderne et farfelue qui se déplace ici
Mais dans sa barbe il
marmonne le vieux Raymond, et bien que de toute façon
La montagne elle attend
personne, elle accueille le monde
La bas
La
"car-caravane" arrive tant bien que mal
Les chiens courent vers
leurs mères
Nous sommes à Lans en
Vercors ou la montagne est si belle si bleu
Suite>>
Caméra action 2
Il est tombé sur terre
alors qu'il cherchait à rejoindre sa maison
Il est tombé, en feu
On l'a pris pour un fou
Il n'avait rien sur lui,
ne connaissait rien des mœurs
Le nécessaire est dans
le Souffle ..
Même pour qui vit
l'instant
Il est un temps pour
tout
Fini les étoiles, les
dragons dans le ciel
La grande traversée
allait pouvoir commencer.
Sans succès apparent, à
l'abri des regards
Franc comme un sous
n'ayant plus rien à perdre
Il s'est levé, la
direction encrée tel un grand navigateur..
On l'a pris pour un fou
Ce n'était que le Feu
D'un grand navigateur
A la recherche de sa
Terre.
Caméra Action 4
Parilly stationnante se
serait-elle réveillée
Parilly transparente se
serait-elle éveillée
Parilly rayonnante la
Parilly de nuit
Chez moi, il a tout pris
Mon air, ma terre, mon eau
Mon ciel est gris
Maintenant, chez moi c'est chaud,,,
Mais il ne veut pas
Me faire de la place
Il ne manque pourtant pas
d'espace
Il préfère s'isoler
Se barricader
Se barbeler
Chez moi il a pourtant tout pris
M'a reproché la couleur de ma peau
A volé mon blé, mon or, mon corps
A fait couler mon sang
J'en ai payé cher le prix
Mais il ne veut toujours
pas
Me faire de la place
Il ne manque pourtant
pas d'espace
Il préfère s'isoler
Se barricader
Se barbeler...
Courte nouvelle
Attention ! Panneau
de signalisation rectangulaire et réglementaire. Écriture nette, noire sur fond
blanc encadré de rouge. Pas de pieds aux lettres, il tient tout seul. Puis,
plus rien, le vide, un trou au milieu de nulle part. Plus aucune indication.
Les couleurs ont disparu de mon champ de vision mais mes sens sont en éveil. Je
sais que je suis en ville. Sauf, que je ne la reconnais pas. Elle ne ressemble
à aucune ville traversée ou visitée. Même en rêve ou à la télévision. Je ne
perçois que des ombres noires et grises en lévitation et mes mains passent à
travers, impossible de toucher du vivant. Pourtant, tout est réel, visiblement
palpable. Tout se déplace, les objets permutent, les immeubles s’échangent leur
place, les mobiliers bougent y compris les ombres qui se renversent. Je ne m’y
sens pas mal juste perplexe et un peu excitée. C’est assez curieux et attirant
comme ville. Toute chose se pose sur les eaux et reste ainsi. C’est comme une
circulation fluide, sans embouteillage, sans accident, sans interruption. On
dirait une errance humaine mais on sent quand même l’affairement d’une
gigantesque cité. Les montagnes émergent d’un coup d’un seul et disparaissent
de la même manière. Elles se mettent à l’abri ou laissent passer l’orage
peut-être. Ah ! Tiens, une autre ombre. C’était comme une blancheur
d’étoile filante ou bien encore une météorite.
Je dois rappeler Marie
pour confirmer l’heure de rendez-vous de dimanche matin…
Ici, un champ de toiles
d’araignées. Là-bas, une forêt sans arbre où des bâtons de sucre d’orge
s’élèvent à l’infini au fur et à mesure que je scrute un peu plus loin à chaque
plissement d’yeux. Au-dessus, des cendres orange et bleu qui pleuvent
uniquement sur les murs. Derrière moi, se referme le chemin, plus aucune trace
de pas, une légère poussière de temps en temps. De mes oreilles bourdonnent des
voix et sifflent des sons. Le bruit de mes mouvements s’intensifie alors que je
ne fais que marcher très très lentement comme sur un tapis de mousse. Dans ma
tête, résonnent un concentré de discours étrangers que je ne connais pas du
tout. Les mots crient, les phrases hurlent, les fragments se déploient et je
n’arrive plus à parler. Qu’ils se taisent à la fin ! La fatigue devient
trop importante, je m’assois. C’est alors que défilent sosies, jumeaux, momies,
atlantes, ovnis, dieux et déesses. Comme dans les histoires et légendes que me
racontaient mes grands-parents ou mon frère pour me faire peur. En boule, je me
recroqueville. En fœtus, je m’enfonce. J’oublie. Mais, je tombe à califourchon
sur un muret jonché de cendres froides et douces. J’y reste telle une écuyère
sur sa monture, à plat ventre. Oh ! Surprise : le muret de marne
avance et recule en cinémascope, tourne, monte et descend autour d’autres
ruines. Les eaux montent. L’angoisse disparaît. Le volcan se soulève et je me
redresse pour apercevoir son vol statique. L’oiseau
Pas de pieds aux lettres
Un trou
Disparu.
Noires et grises
En lévitation
A travers.
Palpable
Perplexe
Excitée.
Circulation fluide
Quand même
A l’abri.
L’heure de rendez-vous
Où des bâtons de sucre
Qui pleuvent
Une légère poussière.
Bourdonnent des voix.
La fatigue
En boule
A califourchon
A plat ventre.
Le muret de marne
Redresse
Son vol statique
A large envergure.
Deux ombres se tiennent
la main
Sur le pas du pays des
adultes
Leurs chemins se
croisent
Se décroisent se
recroisent
Bientôt l’une devient
grise puis floue
L’autre se répand en
sanglots
Son chemin fleurit
Mais l’ombre de qui est qui ?
Rosée du matin
Lutin alcoolique
Gerbe d'arc-en-ciel
L'aube pluvieuse
Fait scintiller
Les verdoyants pieds du
jardinier pauvre
Une mer bleue
Une forêt verte
Un ciel sanglant
La pluie grise du matin
déride
la fourmi assoifée
Sur une branche :
Neuf oiseaux.
L'arbre est nu.
Le cintre sauvage
Chasse
Un pantalon blessé
proverbes
Qui se lêve matin se recouche aussi tôt.
C'est en forgeant qu'on se fait mal au dos.
Rien ne sert de courir quand on a un vélo.
Tant va la cruche qu'elle n'amasse pas mousse.
A bon chat bon matelas.
Toute poule qui chante attire les pigeons.
Pluie du matin, trottoirs
glissants.
L'araignée du silence
tisse sa toile dans les coins sombres. Elle attrape les bruits bourdonnants, et
les dévore. Parfois, un grand fracas fait voler son piège en éclat. Patiemment,
silencieusement, elle se remet à l'ouvrage.
Plus rarement, un doux
murmure se prend dans ses fils. Elle lui tisse un cocon, l'étouffe et le berce
au fil d'un vent sans cri. De nouvelles araignées en naissent et partent à
l'assaut des bruits du monde.
Un jour, peut-être
mourront-elles de faim. Ce n'est pas pour demain.
Thomas Groux