Rimes

 

Sur l’étagère du salon

Souvenir, mystère, abandon,

Dans le musée aux dinosaures

Des inconnus et leur triste sort !

Ni or, ni vermeil

Seulement une bouteille

Dans l’allée au soleil

Au jardin l’ hortensia

La haut la guerilla

Aucun homme rescapé

Seul le chat sur le canapé

Sifflement de la bouilloire

Douceur de son exutoire

Beuvrage à moitié pur

Souillé d’hydrocarbure

Fuite du policier

Par le courant accroché ?

Nouvelle anacoluthe...

Rien compris

ZUT.

 

Annie Maréchal

 

 




Mon monologue d’Hamlet

 

Dormir, c’est partir un peu. Mourir, c’est partir beaucoup.

Je n’ai jamais eu l’âme voyageuse. Je hais les valises, les passeports, les aéroports.

J’ai peur de me perdre dans les couloirs. Je ne sais pas lire un plan.

Comment rejoindre l’hôtel des 2 Mondes ?

Suis-je plus à même d’apprécier le prix des choses si je maîtrise les taux de conversion ?

Faudra t’il apprendre une nouvelle langue : J’ai déjà tant de mal avec ma vieille maternelle.

Serai-je d’époque, avant gardiste ou obsolète ?

Quel ordinateur encore à inventer achèvera de m’éloigner de mon univers actuel pourtant déjà si mal maitrisé ?

 

Ce flou intergalactique m’effraye et m’égare :

A l’aube de quelle lune vais-je me réveiller ? Y aura-t-il un miroir qui saura traduire mon âme immortelle et les traces de mon passé. Y aura t-‘il un visage ami à suivre si tout se dilue dans le néant ?

 

Je ne vais pas parier, je ne vais pas jouer, je ne vais pas pleurer : simplement continuer.

 

Fabienne Faury

 

 




To be or not toubib

 

La ville manque de médecins, surtout d’oto-rhino !

Et mon père en est mort, de ça, et d’un complot !

Un poison fut versé en douce dans son oreille,

Par son frère Claudius, et pendant son sommeil.

Mon père ne sera plus, mon père est au  tombeau.

Et je dois porter seul tout cet imbroglio ?

Et s’il plut certes aux Dieux de fâcher ces deux frères,

Contre eux brouillés hélas ! Que peuvent les êtres chers ?

Et quelles machinations se trament derrière mon dos ?

 

Comment me comporter dans ce cas bien précis ?

Dois-je choisir la vengeance ou préférer l’oubli ?

Que le combat est  rude ! Et mon mal infini !

Subir que le Danemark impute à ma mémoire

D’avoir mal soutenu l’honneur de ma patrie,

En préférant la paix, en fermant mon clapoir ?

Mes plaisirs sont-ils morts si ma gloire est ternie ?

Préférer le trépas  plutôt que l’infamie ?            

Des clous ! Moi je veux m’éclater avec tous mes amis. !

Claudius est au pouvoir et Gertrude ma mère

S’emploie plutôt pas mal à oublier mon père !

 

Je veux vivre coûte que coûte, passer à autre chose.

Et même si j’ai morflé, je ne veux pas trancher.

Ni être calomnié et  ni creuser ma fosse.

Ça  ne me grandi pas mais je veux oublier.

Parce que j’ai l’effroi et ne souhaite pas clamser !

 

Alors toi ma conscience, je te le dis tout net

Arrête de me briser sans cesse les cacahouètes

Je demeure en ce lieu car je suis bien ici

Et toi…Va t’en voir là-bas si j’y suis !

 

 

Rolande DUCRET

 




Feuilles de thé feuilletées

 

 

J'ai vu le livre

sur le guéridon

l'ai feuilleté

puis reposé

 

toujours un livre

pour vivre

et oublier de vivre

 

tendre manne

pour mon âme

patiente et gourmande

à la table des mots.

 

 

J'ai lu des poèmes

comme des mignardises

posées sur un plateau

 

ô ce goût des mots

sucrés poudrés

ivres

dans les livres

 

et que de pensées

infusées

dans l'encre du thé.

 

 

J'ai su la vie

dans les livres

et blottis dans les feuilles

les rêves à vivre.

Christiane Rollet

 

 

 




Haï Ku

 

 

                                  

                                                           Perle de rosée

                                                           Rire du soleil

                                                           Orage en grève

 

 

                                                           La route défile

                                                           La voiture s’ennuie

                                                           Un bouchon, pas de liège bien sûr

 

 

                                                           Chaude après midi

                                                           Cigales au rendez-vous

                                                           Ne pas déranger, on sieste.

 

 

                                                           Gazouillis d’oiseaux

                                                           Parpalèges du voisinage

                                                           Couacs de l’orchestre.

 

 

 

 

Josette Maurice





les Gazous et les Maliçois

 

Il y a de cela très longtemps, cohabitaient deux tribus : les Gazous et les Maliçois Le fils Gazou ayant épousé la fille Maliçois, les deux peuplades vivaient en parfaite harmonie. Jusqu’au jour…

 

  

 

 

  Maître Corbeau sur un arbre perché 

  Tenait en son bec un fromage 

  Maître Renard par l’odeur alléché                         

  Lui tint à peu près ce langage                                

  « Hé ! bonjour, Monsieur du corbeau                     

  Que vous êtes joli ! que vous me semblez beau ! 

  Sans mentir si votre ramage                                    

  Se rapporte à votre plumage                                   

  Vous êtes le phénix des hôtes de ces bois. »       

  A ces mots le corbeau ne se sent plus de joie ;   

  Et pour montrer sa belle voix                             

  Il ouvre un large bec et laisse tomber sa proie

  Le Renard s’en saisit, et dit « Mon bon Monsieur  

  Apprenez que tout flatteur                                   

  Vit aux dépens de celui qui l’écoute :                  

  Cette leçon vaut bien un fromage sans doute. »   

  Le Corbeau, honteux et confus                            

  Jura, mais un peu tard, qu’on ne                          

  L’y prendrait plus                                                 

                               

 

  El bel Gazou in permembouc hissé

  Garda oune bunsen calendos.

  Die Maliçois par fumton calibré

  Lui taqué in petto chicos.

  « Hé !Avé, poupouline Gazou                             

  Qué vo biotifuli, qué vo biotifulou !

  Mentoré ko santé cantou

  Porto lunetti afflelou

  Ripopée the big crack détouté l’espadou »

  Oulipo el Gazou frittes à l’huil-en-isère

  Et vibrato bucco dentaire

  Spectoré dévédé et le fromgo par terre.

  Maliçois embabouine et dit : « Tosti Mezzo

  Esgourdèsse qué landateur

  dépendaré le conneau qui l’écoute :

  Zé corso ine volo chèvre chaud, iznogood.. .»

  El Gazou topique et rafut

  Pestaré dornani et puis

  Guerre des tribus !

 

 

 

Rolande Ducret

 




To be

Tout le principe est de déterminer si l'on est "quelque-chose" plutôt que "rien".

 

Devons-nous nous satisfaire de subir les coups que l'univers s'ingénie à nous lancer et de les encaisser avec indifférence ? Ou devons-nous nous révolter contre lui et contre-attaquer ? D'un coté s'ouvrent à nous les portes de la mort. Le grand sommeil. Par ici, adieu douleurs morales, hésitations de l'esprit, brûlures des sentiments, dilemmes insoutenables.

 

Mais si la mort est un long sommeil, à quels rêves devons-nous nous attendre ? Et surtout, à quels cauchemars ? Peut-être ne gagnerons-nous pas à échanger notre lutte contre l'oppression, l'humiliation, la pauvreté, les affres sentimentaux, l'injustice, la corruption, l'hypocrisie contre un repos éternel.

 

Le poids écrasant de l'univers cherchant à nous réduire à rien, ou si peu que cela en devient presque rien, trois fois rien, presque pas quelque-chose, serait-il supportable s'il nous était offert une solide certitude de "quelque-chose" plutôt que de "rien" derrière le rideau opaque de la mort ? Faut-il craindre davantage d'abandonner notre quelque-chose pour une perspective peut-être plus terrible encore, que de l'abandonner pour ne rien recevoir en échange ?

 

Sans doute vaut-il mieux riposter, dire à l'univers hostile de nous faire une place, lui affirmer sans trembler que, si par quelque hasard malencontreux, nous nous retrouvons là, nous sommes bien décidés à en faire notre parti, et qu'il devra compter avec nous désormais.

 

 

 

"When life gives you lemons, don't make lemonade. Make life take the lemons back! Get mad! I don't want your damn lemons! What am I supposed to do with these?! Demand to see life's manager! Make life rue the day it thought it could give Cave Johnson lemons! Do you know who I am? I'm the man who's gonna burn your house down! With the lemons! I'm gonna get my engineers to invent a combustible lemon that burns your house down!"

Cave Johnson, Portal 2, 2011.

 

Thomas Groux